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L'implication des fournisseurs est vitale pour l'aviation durable

L'implication des fournisseurs est vitale pour l'aviation durable

13 juillet 2022

Le manque de coordination de la chaîne d'approvisionnement freine considérablement le développement de l'aviation durable.

Pour atteindre son objectif de neutralité carbone d'ici 2050, le secteur de l'aviation va devoir adopter des technologies disruptives, mais le manque de coordination, notamment le long de la chaîne d'approvisionnement des industries, bloque tout progrès. Pour y remédier, les constructeurs devraient partager les feuilles de route technologiques avec les fournisseurs, et les gouvernements s'engager à augmenter les financements et à clarifier leurs choix politiques.

Fournisseur d'aviation
Une collaboration plus étroite entre les constructeurs et les fournisseurs de l'aviation est nécessaire au développement des technologies aéronautiques durables.
"Les constructeurs doivent jouer un rôle de premier plan et décider, en collaboration avec les gouvernements et les autorités, des technologies spécifiques à mettre en œuvre pour faire de l'aviation durable un succès."
Portrait of Stephan Baur
Associé
Munich Office, Central Europe

L' industrie aéronautique a conscience de la nécessité d’être plus durable. Selon une récente enquête menée par Roland Berger auprès des fournisseurs de l'industrie et les associations des industries aérospatiales en Allemagne (BDLI) et en France (GIFAS), 64 % des participants travaillent au développement de pièces et de systèmes durables. Certaines solutions sont sur le point d'être certifiées ; d'autres innovations, plus radicales, sont encore en phase d’essai.

Ce sont les fournisseurs de systèmes qui réalisent le plus de progrès en priorisant l'électrification des systèmes embarqués ainsi que d'autres solutions permettant d'économiser du poids ou de l'énergie afin d'améliorer l'efficacité énergétique. Les constructeurs d'aérostructures et d'intérieurs se concentrent également sur la réduction du poids et l'amélioration des circuits de recyclage des matériaux.

Quant aux constructeurs de systèmes de propulsion, ce sont eux qui ont le plus d'impact sur la durabilité des avions. La majorité d'entre eux consacrent actuellement une grande partie de leurs efforts aux carburants aéronautiques durables (CAD) ainsi qu'à des moteurs conventionnels avancés. Trois quarts des participants à l'enquête ont déclaré qu'il s'agissait là de leurs chantiers prioritaires. Un quart d'entre eux ont déclaré que la propulsion hybride était une priorité majeure et seulement 16 % ont évoqué l'hydrogène. La propulsion électrique, qui est surtout adaptée aux vols courts et ne couvrirait donc qu'un faible pourcentage des émissions du secteur, est encore moins prioritaire.

Les carburants d'aviation durables ne suffisent pas

Si cela met les carburants aéronautiques durables au centre de la réduction des émissions de l’aviation, il ne s'agit pas pour autant d'une solution miracle. Selon le Dr Dietrich Brockhagen, fondateur et directeur général d'Atmosfair, une ONG allemande spécialisée dans la réduction des émissions et l'aviation durable, c'est la propulsion à l'hydrogène qui offrirait le plus grand potentiel de décarbonation des vols : 'Les CAD produits par des méthodes "power-to-liquid" utilisent les rares réserves d'électricité verte de manière beaucoup moins efficace".

Mais les objectifs des CAD ne vont pas assez loin, ajoute le Dr Brockhagen. "Couvrir 2% des vols avec les CAD d'ici 2030 n'est pas suffisant pour réussir à généraliser leur adoption d'ici 2050. La technologie n'en est qu'à ses débuts, et il reste de nombreux défis à surmonter. Le projet qui vise à l'ensemble du trafic aérien de CAD d'ici 2050 est déjà en route."

Un manque de coordination qui ralentit les progrès

Cela renvoie à un problème plus large au sein de l'industrie : le développement de la technologie de l'aviation durable est beaucoup trop lent. Les différents acteurs du secteur en ont conscience : 63 % des constructeurs interrogés sont d'accord avec cette affirmation. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer : plus d’un quart (28%) des personnes interrogées déplorent le manque de clarté des constructeurs dans la communication de leurs feuilles de route, 21% évoquent le manque d’investissement comme cause principale, et 18% le déficit en ressources humaines. Pourtant, les difficultés de ces fournisseurs ne sont que la partie émergée de l'iceberg. L’ensemble du secteur aérospatial est touché : les acteurs du marché sont fortement dépendants les uns des autres dans le développement de nouvelles technologies, et les investissements nécessaires à mettre en place sont si importants qu'aucune avancée ne sera possible sans coordination.

Selon les constructeurs, l'absence de ligne directrice et une importance excessive accordée aux CAD limitent le développement technologique. Malgré la nécessité d'une approche plus unifiée, les constructeurs de cellules et de moteurs suivent aujourd’hui des stratégies différentes. De plus, les gouvernements peinent à définir des standards internationaux, ce qui n'incite pas les fournisseurs d'infrastructures à investir dans des infrastructures durables telles que les capacités de ravitaillement en hydrogène.

Pourquoi les constructeurs devraient être les déclencheurs

Quelles sont donc les solutions à mettre en place ? Même si l'ensemble du secteur est concerné, les constructeurs devraient prendre la main et décider, en collaboration avec les gouvernements et les autorités, des technologies à privilégier. Ensuite, il faudrait qu’ils communiquent les feuilles de route technologiques à l'ensemble du secteur de façon claire, rapide et détaillée, en accordant une attention particulière à leurs fournisseurs. Cela permettrait d'intensifier les efforts de R&D tout au long de la chaîne d'approvisionnement et d'accélérer le développement technologique, tout en permettant une allocation plus efficace des fonds. Ainsi, une fois que les technologies seront prêtes, cela permettrait d'établir une feuille de route claire et commune pour toutes les infrastructures dans des domaines tels que le ravitaillement en carburant.

L’horizon 2050 peut sembler lointain, mais les longs délais propres à l'industrie aéronautique nécessitent d'agir rapidement pour pouvoir atteindre ces objectifs. La volonté et la capacité des fournisseurs à être plus actifs pour un progrès durable du secteur sont bien là, mais c'est aux constructeurs de les impliquer de façon plus efficace.

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